29 mai 2017

L’accès aux soins est de plus en plus compliqué pour les français


A quelques semaines du congrès de la Fédération des Médecins de France (FMF), son président, Jean-Paul Hamon, tire la sonnette d’alarme concernant le système de santé français.

La France est en désormais classée 15ème au classement mondial mesurant la qualité et l’accessibilité des systèmes de santé publié aujourd’hui par la revue médicale britannique The Lancet. Chaque pays est classé selon un indicateur mesurant l’accès aux soins et les taux de mortalité de 32 maladies pour lesquelles les décès pourraient être évités grâce à un accès aux soins efficace.

En 2000, la France était arrivée première du classement des systèmes de santé de l’Organisation Mondiale de la Santé. Cette situation ne peut plus être ignorée au pays de la remarquable Sécurité Sociale alors que la nouvelle ministre de la Santé vient de prendre ses fonctions.

Le point avec Jean-Paul Hamon, président de la deuxième force syndicale en médecine :

Breizh-info.com : Qu’est ce qui ne va pas dans notre système de santé ?

Jean-Paul Hamon : L’accès aux soins est de plus en plus compliqué pour les français. Les déserts médicaux s’étendent.

Or, un médecin qui s’en va, c’est un village qui meurt ! La pharmacie disparaît, la population n’est pas renouvelée et l’immobilier s’effondre. Mais cette situation ne concerne pas les seuls villages ! Lorsque l’on parle de désert médical, on peut également citer Paris qui n’a pas su ou voulu faciliter l’installation des médecins de proximité. Le nombre de médecins généralistes à Paris intra-muros a diminué de 20% en 10 ans.

Il y a également, pour expliquer cette complexité grandissante de l’accès aux soins, des raisons financières évidentes pour nombre de nos concitoyens. Le coût de la santé est objectivement de plus en plus élevé : trajets plus importants pour se soigner, médicaments plus chers et moins remboursés, mutuelles plus chères pour une prise en charge moindre…

Les médecins sont ensevelis sous le poids des charges administratives au détriment de l’accueil et du suivi des patients, ils sont stigmatisés et harcelés par la sécurité sociale qui voit en eux le bouc émissaire idéal puisque liés par une réglementation stricte, et les personnels hospitaliers partent en burn-out.

Breizh-info.com : Qu’est-ce qu’il faut mettre en place ?

Jean-Paul Hamon :

• Une égalité d’accès aux soins c’est-à-dire la possibilité de trouver un médecin traitant facilement et rapidement.
• L’obtention de rendez-vous avec des spécialistes dans des délais raisonnables
• Le remboursement correct des soins pour les patients
• Prendre conscience de la nécessaire mise en place de critères d’attractivité pour la médecine de proximité, libérale, avec la mise en place d’une authentique collaboration avec l’Hôpital

Il faut que l’hôpital reste en ses murs, se concentre sur ses objectifs primaires, et ait les moyens de l’hospitalisation. Avant de quitter son ministère, Jean-Marc Ayrault avait dit à Grenoble : « que l’Hôpital ne fasse plus ce qui peut être fait en ville » afin de libérer du personnel pour bien gérer l’hospitalisation ! Je souhaite que la médecine de proximité redevienne attractive, attirante, séduisante, attendue et accueillie pour attirer de nouveaux médecins et en finir tout simplement avec les déserts médicaux. Il faut redonner au médecin de proximité les moyens d’exercer son métier, et nous demandons la création d’un forfait structure afin de travailler dans des conditions acceptables et au bénéfice des patients. Ce forfait permettrait de développer un outil de coordination, installer un secrétariat d’accueil et /ou un assistant médical, avoir des locaux adaptés et créer les conditions d’une confiance rétablie avec les tutelles plutôt que les relations de méfiance actuelles, aux limites du harcèlement.

Enfin, il faut imposer, nous l’exigeons en vain depuis des années, une communication en temps réel entre la ville et ses médecins de proximité et l’hôpital : les patients ont besoin d’une sécurisation de leur prise en charge .

Breizh-info.com : Est-ce que la nouvelle ministre vous parait volontaire pour cela ?

Jean-Paul Hamon : Marisol Touraine n’a eu de cesse de briser toutes tentatives de dialogues avec la médecine libérale. Nous sommes donc ravis de ce changement de ministre. C’est une femme intelligente qui a un CV qui parle pour elle. Nous espérons qu’elle mettra son intelligence au service d’une réforme du système de santé français qui en a bien besoin .

Breizh-info.com : Quel est le bilan de Madame Touraine ?

Jean-Paul Hamon : Le programme de Marisol Touraine a bénéficié d’une communication habile mais en dehors de cela, peut-on même oser se poser la question de savoir ce qui a été efficace… la politique conduite par Marisol Touraine a été une catastrophe et la France a perdu 5 ans.

Cela avait pourtant bien commencé avec la prise en charge de l’avortement à 100%, mais c’est bien la seule chose positive car la gratuité de la contraception de l’adolescente est d’une rare complexité et est inutilisable.

Marisol Touraine a stigmatisé les médecins libéraux, elle a fait le lit des mutuelles qui pourtant remboursent moins les patients. Le tiers payant va être d’une complexité rare et les médecins qui pratiquent déjà largement le tiers payant social refuseront le tiers payant généralisé et obligatoire.

Breizh-info.com : Quel sera le programme du congrès ?

Jean-Paul Hamon : Nous aborderons tous les thèmes clefs qui ont besoin d’être évoqués ensemble. C’est tout l’intérêt du Congrès : prendre le temps de l’échange sur des sujets connus et sur lesquels les points de vue peuvent diverger et découvrir des réflexions nouvelles. Ainsi nous aborderons la démographie médicale, la télémédecine ou encore la problématique des soins non programmés.

La protection des données médicales est un sujet qui nous préoccupe. Comment préserver le secret médical dans un monde où tout est accessible, commercialisable ?

Comment, dans ce contexte également, mieux protéger les patients en communiquant mieux entre médecins de ville et hospitaliers ? La protection des données médicales est donc un sujet qui nous préoccupe aussi bien pour les patients que pour le budget de notre securité sociale, afin d’éviter les mauvaises prises en charge, les répétitions du même examen, les sur-médications, ou encore l’impasse sur des pathologies connues….par le médecin de proximité !

Propos recueillis par Yann Vallerie
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